La déclaration de la CGT s’attardera sur les lycées professionnels dont le projet de réforme imposé par le Président de la République suscite légitimement inquiétudes et indignation. Cette réforme serait applicable dès la rentrée 2023 sans concertation en amont de cette annonce, avec une feuille de route tardive et floue alors même que des décisions lourdes de conséquences pour les jeunes sont en préparation, et sans bilan des réformes précédentes qui ont toutes visé la réduction du nombre d’heures disciplinaires. Est-ce que cela veut dire que la prochaine mandature sonnera le glas de la voie professionnelle sous statut scolaire ?
Nous dénonçons cette nouvelle offensive organisée par la puissance publique contre l’élévation du niveau de connaissance des jeunes scolarisés dans la voie professionnelle sous statut scolaire.
Ce projet de réforme s’appuie sur une double volonté :
- d’une part, la volonté de calquer ces formations sur l’apprentissage en augmentant d’un tiers le nombre de semaines de formation en entreprises, dont le contenu pédagogique serait rédigé par chaque entreprise alors que souvent elles ne disposent pas de l’intégralité des plateaux techniques et des activités indispensables à l’obtention du diplôme, généralement un Bac pro 3 ans, avec de nouveaux lieux de stage pour chaque élève alors qu’il est déjà très souvent difficile pour eux d’en trouver. C’est donc aussi moins d’enseignement général recentré sur des matières dites « fondamentales », maths etfrançais, alors que tous ici savent bien que les autres enseignements contribuent aussi à l’élévation indispensable du niveau de connaissances et à la formation citoyenne, l’ouverture au monde … La propagande du « on apprendrait mieux sur le tas » diffuse une vision archaïque de ce que devrait être la formation professionnelle et un prétexte pour redonner, encore plus, la main au patronat sur les enseignements. Les lycées professionnels sont des EPLE dont la vocation est d’être au service des élèves et non des entreprises. Celles-ci présentent pour les jeunes – qui, de surcroît, ne peuvent se défendre –, les mêmes risques liés aux manquements à la sécurité, à l’exposition aux produits dangereux, aux accidents du travail et aux violences sexistes et sexuelles que pour les adultes.
- d’autre part, la volonté de renvoyer à des « expérimentations locales » et des décisions prises dans les établissements, sous couvert d’autonomie renforcée, le transfert des contenus professionnels sur les stages en entreprise, la réorganisation de la scolarité et du temps scolaire, l’augmentation et la dérégulation des périodes de formation en milieu professionnel … Ces différenciations aggraveront les inégalités sociales et territoriales et conduiront à la destruction du caractère national de l’accès aux formations et des diplômes professionnels.
Oui la carte des formations doit évoluer, et la CGT le porte haut et fort depuis des années. Elle doit évoluer dans l’intérêt général du pays pour répondre aux grands enjeux écologiques, aux besoins sociaux dont la prise en charge du grand âge, à la nécessaire réindustrialisation, aux évolutions technologiques et numériques … Il faut redonner à la carte des formations une vision sur le long terme en développant notamment les formations en relation avec les enjeux climatiques et environnementaux et celles du soin et du lien.
En aucune façon, son « évolution » ne doit se restreindre à la seule mise en adéquation avec les besoins économiques immédiats et locaux des entreprises et continuer à fermer des filières utiles mais qui ne remplissent pas. Cette logique d’adéquation absolue entre formation et besoins immédiats des entreprises locales est une vision à court terme.
Le lycée professionnel accueille l’ensemble des jeunes sans discrimination et les fait réussir. C’est donc une voie de formation initiale qu’il faut développer. Cette réforme qui réduit le temps de formation professionnelle, qui limite la carte des formations aux débouchés locaux, qui ferme des formations, qui restreint les possibilités d’orientation des jeunes est à l’opposé de nos ambitions pour les lycées professionnels afin que tous les élèves réussissent et que chaque jeune puisse accéder à la formation de son choix.
Les organisations syndicales sont fermement attachées au principe d’égalité de notre école républicaine et revendiquent le maintien d’un cadre national, dont une grille horaire, pour toutes les filières professionnelles. Elles revendiquent aussi une dimension émancipatrice de la formation des jeunes à laquelle participent toutes les disciplines.
L’urgence est de renforcer les lycées professionnels et de donner plus de temps et de moyens aux personnels face à cette menace de ce qui ressemble sans ambiguïté à un vaste plan social !